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La Slovaquie et son héritage médiéval

Bratislava Bratislava

Bratislava

De Bratislava au cœur des Carpates, sur la route des innombrables forteresses qui témoignent d'une histoire agitée, l'imaginaire romantique s'en donne à cœur joie dans ce décor naturel que les cinéastes du monde entier se disputent. 

Dans un vibrato de vaguelettes, nous descendons le Danube. La bateau nous a embarqué 70 km en amont, à Vienne. Sur bâbord, dominant un affluent, une tour sur un piton. On dirait celle d'un jeu d'échecs. Des chemins de ronde affaissés la relient à des parois hérissées de créneaux : c'est Devin. «Au bas de la falaise, la Morava tentait avec peine de faire pénétrer ses eaux vertes dans les flots boueux du Danube», notait l'écrivain français Vercors, venu ici. 

Devin
DEVIN
Devin site témoin de l'histoire depuis des milliers d'années.
Devin site témoin de l'histoire depuis des milliers d'années.

Marquant la frontière Devin est une œuvre tricolore : Napoléon passant par là, ordonna à ses sapeurs de transformer avec leurs barils de poudre la forteresse menaçante en une ruine aujourd'hui touchante. Sous les remparts, un porche grêlé de balles témoigne pour ceux qui sont morts ici en forçant le Rideau de fer. 

L'histoire slovaque est celle d'une frontière tournant telle une corde à sauter, entre Autriche, Pologne, Hongrie, Moravie, Pacte de Varsovie....À Devin, le Danube autrichien devient slovaque, mais à demi seulement, car la rive droite est hongroise. Rarement libre, cette terre a été razziée par les Mongols, les Turcs, les Tartares et le IIIe Reich. Raison pour laquelle les fortifications de toutes les époques y abondent. Tel ce blockhaus entouré de gazon et devenu musée : un échantillon de la ligne Benes, dessinées par les mêmes ingénieurs que la ligne Maginot. Avec les accords de Munich de 1938, les bunkers tombent entre les mains de Hitler. La «ligne» servira à entraîner ses soldats à l'invasion de la France. 

Une capitale entre histoire et modernité 

Nous déparquons à Bratislava. Qui n'a jamais confondu Slovaquie et Slovénie ? Chaque année, le tri postal de leurs deux capitales échangent le volume d'un wagon de lettre mal adressées ! Sur la colline, les quatre tours et les murs immaculés du château auquel on accède par des volées d'escaliers se voient en tout premier. 

En 1536, lorsque les Ottomans prirent Budapest, la cour hongroise y trouva refuge, faisant de Bratislava leur capitale. Tous les châteaux d'ici ont essuyé les attaques des janissaires turcs, troupes formées d'enfants chrétiens ôtés à leurs familles, convertis à l'Islam et aux extases guerrières dès que timbales, hautbois et haschisch donnaient le signal à l'assaut. 

Des capitales de l'Union Européenne, Bratislava est l'une des plus jolies, c'est dans la vieille ville que se trouvent les principaux monuments historiques, on y entre par la porte de Michel,  porte médiévale à clocher de cuivre, qui est la seule porte datant du moyen âge. La place centrale est bordée de bâtiments élégants, de palais multicolores dont les frontons ont entendu les récitals de Mozart enfant,  certains sont de style Art Nouveau. Bratislava est dominée par le vieil hôtel de ville. Au hasard des rues l'on tombe sur d'amusantes statues qui peuplent la capitale. La plus célèbre est sans doute la statue Cumil, qui semble observer les passants. Il suffit de lui toucher la tête pour que nos vœux se réalisent. 

Bratislava est aussi une cité vibrante de caves à rock, pubs et brasseries polyglottes où la jeunesse de Francfort ou de Sheffield vient à bas prix enterrer vies de garçons et de jeunes filles. 

Fortification et murailles médiévales 
Trnava, mur d'enceinte.

Roulant, vers le nord, nous traversons Trnava, si bien garnie en églises dorées aux clochers verts qu'on la surnomme la Rome slovaque. Encadrée de beaux murs de brique, la ville entière était citadelle. Dans l'univers batailleur du Moyen Âge slave, une ville ne pouvait naître que dans le cocon d'une enceinte. 

À droite de la route, une grosse dent de sagesse jaillit parmi les pousses de seigle. Elle porte une couronne de murailles. C'est Beckov. «le château du fou». Un prince s'étant fort diverti d'une farce de son fou, il lui accorda un vœu. «pouvoir bâtir un château sur ce roc». Dubitatif, le prince accepta néanmoins. Il ignorait que son bouffon exigerait que tout passant paye son écot en œuvrant à la construction, vite achevée. Les Turcs menaçant son fief, le prince réclama la forteresse. Le fou - qui ne l'était guère - en fixa le montant : son poids en or. 

Maintenant Direction Trencin. 
Château de Trencin

Des murs en zigzag grimpent jusqu'au donjon coiffé de bois. Il veillait sur les gués de la rivière Vah. On y construit encore des radeaux à l'ancienne et les passeurs en costume mènent les touristes dans le frais murmure du courant. Pour atteindre le château-fort, on longe une forêt sauvage façon Belle au bois dormant. Nous atteignons enfin le puissant empilement de tours : un tableau cubiste qui, en 1995, fut le décor du film fantastique "Cœur de dragon". Les forts slovaques ont tant de succès qu'un organisme a été crée pour aider les cinéastes à choisir, entre l'austère nid d'aigle de Strecno et le pimpant castel de Budatin, remis au goût de la Renaissance par les barons des Carpates. 

Château de Strecno - Château de Budatin Château de Strecno - Château de Budatin

Château de Strecno - Château de Budatin

Sur la piste du vampire des Carpates

Occupant tout le nord de la Slovaquie, les verdoyantes Carpates évoquent immanquablement les vampires. Et justement....Perçant les plus austères du massif, nous admirons la vertigineuse forteresse d'Orava, montagne de murailles verticales rehaussant  un pic rocheux. 

Forteresse d'Orava
Forteresse d'Orava

En 1922, Murnau tourna ici son horrifique "Nosferatu", filmant dans la première cour l'angoissante rencontre entre le clerc de notaire et le cadavérique comte Orlock, un peu trop accro....au sang frais ! Nous parcourons en accéléré les corridors sonores d'Orava, dans le stress de la fermeture que le gardien va sonner, nous captons l'atmosphère qui a séduit Murnau, un maniaque des lieux maléfiques.  

Bojnice aussi fait rimer castral et spectral 

Tous les ans, le château organise un festival de Fantômes. Marqué par le néogothique XIXe, ses toits en pointe et ses encorbellements, Bojnice a copié sans vergogne deux chefs-d'œuvre de Viollet-le-Duc : Pierrefonds et Carcassonne. C'est le plus visité du pays, mais nous lui préférons une architecture plus slave : Spis. 

Le château de Spis
Le château de Spis

Ménageant ses effets telle une poupée de gigogne, échelonnant enceintes et poternes, le château de Spis se perche sur les 41.500 m² d'une pyramide de travertin. Ses courtines, ses recoins ont juste gardé ce qu'il faut d'indices pour en laisser deviner l'usage. Au XVIIIe siècle, les héritiers payaient si cher en taxes qu'ils y mirent le feu. Les décombres n'étant plus comptés en surfaces habitable, ils échappaient à l'impôt. On leur doit donc cette silhouette martiale mais élégante, cette arête maçonnée qui ne fait qu'un avec le calcaire, passant sans transit du minéral à l'histoire. Tel est cet univers slovaque, fruit des amours de l'âme slave avec le pied d'une montagne. 

L'organisation des châteaux est immuable : dresser un mur autour d'un point élevé pour que l'ennemi ne l'occupe pas. Un château ne fonctionne jamais seul. Les forteresses restaient à portée les unes des autres pour se couvrir mutuellement et pouvoir communiquer. 

Auréolées de légendes, à commencer par celle de Dracula, les montagnes occupent les deux tiers du territoire slovaque, le pic Gerlach est leur point culminant (2 655 m). Le magnifique massif des Tatras, abrite 5.000 ours, 3.000 loups ; des lynx et des aigles royaux. 

Savourer enfin la cuisine Slovaque !
© iStockphoto

La cuisine de ce pays connaît des influences slaves mais aussi hongroises, autrichiennes et germaniques que l'on retrouve de manière différente selon les régions.  Les Slovaques apprécient les feuilles de chou farcies, les marinades, la truite et la carpe, les fruits en conserves et les produits laitiers. Les plats sont souvent accompagnés de quenelles facies au fromage, aux pommes de terre ou aux fruits ..cerises, pommes...Mais l'oie au chou rouge est un des délices de l'automne.  

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