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Catherine II de Russie - La Grande !

Catherine II de Russie est à l'origine une petite princesse prussienne. Éduquée par une gouvernante française, elle apprend à l'adolescence à s'intéresser aux philosophes et aux idées des Lumières. Amoureuse immodérée des livres, elle aime tout autant les hommes, mais n'aura que deux grands amours dans sa vie : Grigori Orlov et Potemkine. 

Un livre  -  Catherine II : un âge d'or pour la Russie.. Hélène Carrère d'Encausse, Éditions Fayard, 2003.

Le contexte : 

Au cours du XVIIIe siècle, Pierre la Grand, au prix d'une longue guerre avec la Suède, obtient un accès à la mer Baltique ; il y fait construire Saint-Pétersbourg, qui devient la nouvelle capitale en 1712, symbolisant ainsi l'ouverture du pays vers l'Europe. une puissante industrie métallurgique. La première d'Occident à l'époque, est édifiée dans l'Oural et permet de soutenir l'effort de guerre. Le 2 novembre 1721, Pierre prend le titre de tsar qui lui était jusque-là accordé. Mais sur le plan culturel et éducatif, le pays est en retard, ce qui ne lui permet pas de peser ni d'être reconnu par les autres nations européennes. Les souverains, y compris Catherine II font venir un grand nombre de colons allemands, d'artisans et de savants occidentaux, pour moderniser le pays, édifier des industries et jeter les fondements des établissements d'enseignement et de diffusion du savoir.

Les bases de la langue littéraire russe sont définies par Mikhaïl Lomonossov. Les premiers journaux sont publiés à cette époque. La noblesse russe s'occidentalise, surtout sous l'influence de la philosophie allemande et de la langue française, et certains de ses membres s'enthousiasmeront pour les idées des Lumières et parfois même de la Révolution Française.  

La jeune Sophie-Frédérique d'Anhalt-Zerbst naît le 2 mai 1729 à Stettin, en Prusse. Fille d'un couple princier, ces derniers déplorent qu'elle ne soit pas un garçon. Son enfance est très solitaire, ce qui explique son amour pour les livres et la littérature qui ne la quittera jamais. Son éducation protestante est austère et rigide. La seule personne qui lui témoigne de l'affection est sa gouvernante, une huguenote française nommée Babette Cardel. C'est elle qui dirige son éducation et lui donne l'amour de la langue française. Sophie gardera longtemps une véritable fascination pour la culture française et le royaume de France. Très vite, les activités spirituelles, les études et la lecture sont ses principales occupations. 

Son rang, ainsi que les relations de ses parents, l'introduit très tôt dans les plus hautes cours d'Allemagne, où son charisme la fait rapidement remarquer. Le souverain Frédéric II sait que le neveu de l'impératrice de Russie : Pierre Fiodorovitch, doit succéder à sa tante et qu'il lui porte une véritable admiration, car il a été élevé en Prusse. Afin de le garder sous contrôle prussien, il compte bien lui faire épouser une princesse de son royaume. La mère de Sophie,  qui suit les affaires russes de très près, envoie alors plusieurs portraits de sa fille aux deux cours.  Sa fille est à peine adolescente ; Elisabeth Petrovna (Elisabeth 1ere impératrice de Russie) accepte, car elle est jeune et inexpérimentée en politique, donc n'est pas un danger pour le trône russe. En réalité, Sophie a déjà une bonne conscience politique. 

À quinze ans, Sophie, grande brune aux yeux bleus, épouse Pierre et est rebaptisée, lors de son baptême orthodoxe, Catherine Alexeïvna. Elle manifeste tout de suite un réel attachement à la culture de son nouveau royaume et à sa nouvelle religion, au contraire de son époux, ce qui lui vaut très tôt une grande popularité. 

Parallèlement, des intellectuels de passage à la cour de Russie lui conseillent des lectures : Montesquieu, Voltaire, Rousseau, Plutarque, Diderot font bientôt partie de ses auteurs préférés.  

Le mariage est très vite malheureux ; Pierre III ne s'occupe pas de sa femme, avec laquelle il ne partage rien ; bien pire, il la met en résidence surveillée, car il estime qu'elle est une menace par ses lectures, ses opinions et son goût pour la France, en conflit avec la Prusse qu'il soutient. Il prend rapidement une maîtresse et menace de l'installer sur le trône. Catherine prend alors un amant, le comte Sergueï Saltykov. Lorsqu'elle accouche en 1754 du futur Paul 1er, son mari pense d'ailleurs qu'il s'agit du fils de son amant. L'enfant lui est aussitôt arraché par Élisabeth, qui désire l'élever elle-même. Par la suite, pour ses petits-enfants, Catherine procédera de la même manière. 

Le chancelier Nikita Panine devient l'un des hommes sur lesquels elle s'appuie le plus. 

Catherine II fait reconstruire à Saint-Pétersbourg le palais Catherine - Elle l'aménage et aime particulièrement y passer du temps

Après Saltykov, en 1755, Catherine tombe sous le charme du comte Stanislas-Auguste Poniatowski. Sous son influence, elle entretient des liens avec l'ambassadeur anglais. Une ébauche de complot émerge, mais est découverte : l'impératrice Élisabeth demande le renvoi de Poniatowski et de l'ambassadeur anglais. En 1760, Catherine rencontre Grégoire Orlov et ses frères ; c'est le début d'une liaison passionnée et, grâce à l'appui et à celui de l'armée, Catherine II monte sur le trône à la mort d'Élisabeth par un coup d'état. Sans cela, si Pierre montait sur le trône, elle se savait condamnée à la répudiation et au couvent - il n'en faisait pas mystère. 

Catherine décide de précipiter les événements par la suite en se faisant couronner le 22 septembre 1762 ; mais sa situation est précaire vis-à-vis des autres souverains européens qui la considèrent illégitime. Pierre III est rapidement tué - dans des circonstances obscures.

Sa politique intérieure est fondée sur la pensée des Lumières. Elle réorganise l'administration provinciale, renforce le contrôle sur les zones rurales, désire abolir le servage, mais se heurte à l'hostilité de la noblesse. La Russie devient, sous son gouvernement, le premier producteur de fer, de fonte et de cuivre. Mais la Russie impériale reste sous-développée économiquement, politiquement et culturellement. 

De son amant Orlov, Catherine a deux enfants, mais refuse de se marier, ce qui en fait des enfants illégitimes. Elle aura toutefois une grande affection pour eux. En 1772, lors d'une absence d'Orlov, les proches de Catherine lui rapportent toutes les infidélités de son amant. Catherine décide alors de s'en séparer, et prend un nouvel amant - qui sert de transition - Vassiltchikov qui n'a que la beauté pour lui.  

Potemkine

En 1773, elle tombe amoureuse de Potemkine. Physiquement, c'est un colosse, mais il est laid et borgne. Ce qui séduit Catherine est son exubérance, son humour, son caractère impétueux et son infinie curiosité. Lors des conversations, il s'enflamme sur tous les sujets, est un grand buveur, un débauché, un grand mangeur. L'impératrice en est éperdument amoureuse et voit en lui tout ce qu'il peut apporter de relations et de liens avec une Russie qu'elle ignore. Potemkine exige tout de Catherine : faveurs, honneurs, pouvoir, et il aura tout. Il est très possible que le couple soit allé jusqu'au mariage secret. Paul et Panine s'indignent des largesses de l'impératrice et de l'influence que son amant peut avoir sur elle ; Potemkine est hostile à la Prusse, tandis que la stratégie de Panine en politique intérieure est au contraire d'y être alliée. Bien vite le nouvel amant craint les complots contre lui et s'éloigne de l'impératrice en 1776. Mais ils continueront à s'écrire presque quotidiennement et il veut garder un contrôle sur la vie de Catherine. Il décide d'être celui qui lui présentera ses amants - comme en France Madame de Pompadour avec Louis XV. Pour cela, les jeunes hommes doivent passer devant un «jury» testant leur santé, leurs aptitudes intellectuelles et sexuelles. Plus elle vieillit, plus ses amants seront jeunes ; elle aura à cœur de les instruire et de les éduquer dans le domaine de la culture et de la littérature. Elle a un intense besoin d'aimer, en grande partie à cause de ses années de solitude et de désert sentimental lors de son enfance et de son adolescence. 

En public, elle n'autorise aucune privauté, est attachée à préserver la décence et à se faire respecter. Elle porte également une passion maternelle à son petit-fils Alexandre, qu'elle considère comme son héritier.

Amie des philosophes, ils se bousculent à sa cour, dont Diderot, Grimm, Casanova. Elle protège également les lettres russes, encourage la création de journaux satyriques, les jeunes auteurs. Elle aime également écrire elle-même, surtout sur l'éducation et l'enseignement, mais aussi des pièces de théâtre et des écrits historiques. Elle collectionne également les peintures et surtout les livres - elle rachète la bibliothèque de Diderot lorsque ce dernier est dans le besoin en lui en laissant l'utilisation complète, puis celle de Voltaire en 1778. 

La mort de Potemkine en 1791 l'anéantit ; elle perd un homme qu'elle aimait profondément et un grand chef militaire conquérant avec lequel elle avait rêvé d'étendre au plus loin les frontières de son royaume. De plus Potemkine savait calmer les ambitions des grandes familles et les combinaisons factionnelles.

La Russie annexe de grandes parties de la Pologne. En 1772, elle conclut avec la Prusse et l'Autriche un traité qui démembre la Pologne. En 1774 un accord avec l'Empire Ottoman, lui assure plusieurs provinces méridionales et lui ouvre la mer noire. Catherine fait de la Russie un pouvoir dominant au Moyen-Orient après la première guerre contre l'Empire Ottoman. Son projet vise à rétablir un royaume Grec ayant pour capitale Constantinople. Elle annexe la Crimée, en 1783, neuf années après que celle-ci eut obtenu son indépendance. L'Empire Ottoman déclenche une seconde guerre en 1787 qui se termine en 1792. Elle agit comme médiatrice pendant la guerre de succession bavaroise de 1778-79 entre la Prusse et l'Autriche. En 1780, elle monte la Ligue de neutralité armée afin de défendre les vaisseaux indépendants de la Grande-Bretagne pendant la guerre d'indépendance des États-Unis. Enfin en 1788 et 1790, la Russie s'engage dans la guerre contre la Suède pour le remettre à un cousin de l'impératrice. 

La Révolution française et l'assassinat du roi de Suède l'obligent à prendre des mesures de répression devant toute menace envers son pouvoir. 

Le 6 novembre, à soixante-sept ans, elle meurt après une chute et trente-six heures d'agonie. Son fils Paul va dans son bureau bruler le testament où elle le déshéritait au profit d'Alexandre. Il va jusqu'à la faire enterrer auprès de son père. Elle repose aussi à côté de son mari détesté pour l'éternité. 

Elle fut la souveraine avec la plus grande longévité de l'histoire de l'empire Russe.

Autre ressource bibliographique : Jean des Cars - Des couples tragiques de l'Histoire (Perrin) 

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