23 Juillet 2021
Niché au coeur du parc régional du Lubéron, à 10 km d'Apt, le village de Rustrel abrite un véritable bijou. Ici, le dépaysement est garanti !
Le Colorado provençal de Rustrel s'étend sur une centaine d'hectares. Les lieux appartiennent conjointement à la mairie de Rustrel et à cent cinquante héritiers de ocriers. Ils sont gérés et entretenus par une association. C'est l'abbé Martel, président d'Alpes de Lumière, qui, en arpentant les sentiers dans le but de créer le GR6 dans les années 1950, a baptisé le site. L'une des particularités du Colorado provençal est qu'il est le résultat de l'action combinée de la nature et de l'homme.
Tout commence il y a deux cent trente millions d'années : la Provence est alors entièrement sous la mer et au fond des eaux se forment des calcaires blancs qui seront ensuite recouverts par des sédiments sablo-argileux de couleur verte. Après le retrait de la mer, plusieurs millions d'années après, les sables sont altérés et l'argile se charge d'oxyde de fer, ce qui donne naissance au minerai d'ocre.
C'est à la fin du XVIIIe siècle qu'est lancée l'exploitation de cette ocre dans la région. Elle est artisanale jusqu'à l'arrivée du chemin de fer à Apt en 1877. Débute alors une exploitation industrielle qui se poursuivra jusqu'en 1930. Mais à Rustrel, où le premier coup de pioche a été donné en 1871, elle reste artisanale, y compris durant l'âge d'or du site.
L'ocre est à cette époque expédiée dans le monde entier pour fabriquer des gammes de couleurs.
L'arrivée des colorants synthétiques marquera le déclin, puis pratiquement la fin de la production.
De nos jours, il ne reste plus qu'une entreprise qui extrait l'ocre du Luberon et le commercialise.
En arrivant à Rustrel, on tombe immédiatement sous le charme de ces lieux d'exception qui pourraient aisément faire croire aux visiteurs qu'ils viennent d'effectuer un voyage express au beau milieu des grands espaces américains !
La palette de couleurs qui s'offrent aux yeux est unique : on est plongé dans un monde fait de jaunes, de rouge d'oranges, mais aussi de nuances de brun, de vert ou même de mauve. Depuis l'arrêt de la production d'ocre, la nature a repris ses droits et fait évoluer le site en permanence. Car loin d'être désertique, le Colorado provençal est riche d'une flore remarquable : pins maritimes, bruyères, châtaigniers y poussent en abondance et apportent leurs propres touches de couleur.
Par ailleurs, de nombreux vestiges de l'exploitation orcrière subsistent ici et là : wagonnets, canalisations, bassins de décantation, cabanon en brique abritant les moteurs des pompes qui servaient au lavage de l'ocre.. Deux promenades sont proposées sur le site, qui se visite exclusivement à pied. Afin de préserver les lieux, il n'est pas possible de s'aventurer hors des sentiers balisés.
Long de 2.1 Km, le circuit du Sahara est un parcours sans difficulté d'environ 40 minutes. Le circuit des Belvédères fait quant à lui 3.9 Km et traverse les trois endroits les plus emblématiques du Colorado provençal : le Sahara et ses dunes de sable, les «cheminées de fées» qui rappellent la Cappadoce Turque, et le «Désert blanc», un grand cirque escarpé. D'un dénivelé supérieur, cet itinéraire surplombe l'ensemble du site. Les deux sentiers sont accessibles librement. Pour profiter un peu plus longtemps de cet environnement, vous pouvez apporter votre pique-nique et manger sur les tables prévues à cet effet, en veillant bien à ne laisser aucun déchet derrière vous.
Et si Rustrel vous a plus, vous pourrez parfaire votre connaissance de l'histoire des ocres de Provence dans la région. Ainsi, le sentier des ocres qui se trouve dans le village de Roussillon, est assez spectaculaire. Et à 6 km de là, à Gargas, un parcours a été aménagé dans les galeries des mines d'ocre de Bruoux. Il permet de découvrir de l'intérieur toutes les facettes du travail des mineurs. ▼
Au pied du mur d'entrée de la carrière, l'effet est saisissant. 40 km de galerie, 100 d'exploitation, 150 mineurs...Titanesque ! Intriguant aussi...comme si on se retrouvait devant le poing d'un géant déchu et flamboyant, ou au pied d'une cathédrale entaillée de 12 immenses entrées en ogive...50 mètres plus haut, les pins penchés habillent d'un liséré vert les contours de la roche.
Derniers préparatifs avant de pénétrer dans le ventre de la carrière : on se coiffe d'un casque mis à notre disposition et bien sûr on enfile une petite laine pour suivre les pas des ocriers. On déambule dans le ventre de la mine et ses galeries, étroites et très hautes. Certaines montent jusqu'à 15 mètres de hauteur ce qui n'est pas oppressant. On se laisse guider dans ce labyrinthe géant et les plus jeunes s'égarent dans leur monde imaginaire, les yeux roulant du sol au plafond. On chemine entre les ustensiles et les nuances d'ocre, et on croise même une galerie qui servit à cultiver le célèbre «champignon de Paris». D'ailleurs les champignonnières de Gargas ont produit jusqu'à 700 tonnes par an, jusqu'en 2007.
Avec son accent, son savoir bien sûr mais aussi son humour, notre guide contribue au moins pour moitié à l'intérêt de la visite. Le divertissement est assuré ! Il alterne les explication techniques et anecdotes locale, drôles ou familiales. Maîtrisant parfaitement son sujet, il nous partage l'histoire de la mine et nous fait revivre le travail des hommes pour creuser ces kilomètres de galeries et extraire l'ocre.
Autre magie des lieux, on déambule au-dessus de la nappe phréatique admirant le reflet de jade de l'eau sur les murs ocre. Encore un magnifique souvenir !
À l'extérieur, l'environnement des mines d'ocre de Bruoux est également très agréable à visiter. Un beau jardin et plusieurs sentiers de promenade permettent de profiter pleinement du cadre naturel exceptionnel du Luberon.